Une balise (ou traceur, ou tracker GPS) est un appareil
électronique qui, placé discrètement sur un véhicule, permet
de suivre à distance ce véhicule (privé, professionnel...)
pour de connaître son parcours, en direct ou en différé.
Ce type d'appareil, par exemple, permet aux services officiels
de prendre des suspects en filature à distance, sans risque
d'être repérés, ou, également
le suivi par une entreprise de sa flotte professionnelle,
notamment pour des transports sensibles ou risqués.
Ce type d'appareil est facilement trouvable, en vente libre,
sur Internet pour des sommes dérisoires en fonction de la
version qui permet de retracer en direct ou en différé, voire
de la durée de conservation de l'historique et du mode
d'alimentation (piles, batterie du véhicule).
L'affichage de l'itinéraire intervient soit en utilisant
une carte SIM qui envoie les informations sur
un site Internet, un smartphone..., soit, sans carte SIM, en relevant les
informations directement sur la balise elle même une fois le véhicule
arrêté ou garé.
La géolocalisation peut, également, être implantée sur le
smartphone d'un surveillé pour suivre son itinéraire à travers
des applications sur Internet. Dans ce cas il faut avoir accès
au portable pour
installer.
La géolocalisation d'une personne par le biais d'une balise
(hors cadre légal des services officiels) faisait l'objet
d'une déclaration préalable de la Commission nationale de
l'informatique et des libertés, supprimée depuis l'entrée en
vigueur du
R.G.P.D., ce qui n'entraîne pas, pour autant, la légalité
de tels usages qui constituent, toujours, diverses violation
du droit en fonction de la mise en application de cette
technique.
La Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés
avait, d'ailleurs, publié une délibération fixant les
conditions dans lesquelles un tel dispositif pouvait être
implanté sur les véhicules professionnels (Délibération
n° 2015-165 du 4 juin 2015 portant adoption d'une norme
simplifiée concernant les traitements automatisés de données à
caractère personnel mis en œuvre par les organismes publics ou
privés destinés à géolocaliser les véhicules utilisés par
leurs employés), la
norme simplifiée n° 51. Le site de la C.N.I.L. permet
d'obtenir des précisions sur l'usage de la géolocalisation "post-rgpd"
dans les entreprises.
En droit pénal, l'utilisation d'une balise, à
l'insu d'une personne, est interdite et peut constituer divers
délits dont celui prévu à l'article 226-16 du Code pénal
(300.000€ d'amende et 5 ans de prison). Au surplus, le fait de
capter, enregistrer, transmettre, par quelque moyen que ce
soit, la localisation en temps réel ou en différé d'une
personne sans le consentement de celle-ci tombe également sous
le coup de l'article 226-1 (3°) du code pénal avec des
sanctions qui peuvent s'échelonner d'un an de prison et
45.000€ d'amende, jusqu'à deux ans et 60.000€ pour les
conjoints (voire les complices).
En droit du travail une telle utilisation peut
constituer, dans le cadre d'un salarié, une violation de
l'article L1222-4, du code du travail.
En droit civil,
selon la technique utilisée, peuvent également s'appliquer les
sanctions visées à l'article 9 du code civil.
En droit informatique
: l'utilisation illégale de ce type de matériel peut entraîner
une sanction financière de la Commission Nationale de
l'Informatique et des Libertés.
En droit professionnel,
si l'infraction est commise par un agent de recherches
privées, des sanctions disciplinaires peuvent être engagées
pour violation des lois et de la déontologie, pouvant aller
d'une sanction financière à une interdiction d'exercice par
retrait de l'agrément, de l'autorisation ou de la carte
professionnelle dans les conditions prévues par le Livre VI,
titre III du Code de la Sécurité Intérieure.
L'utilisation par un détective, d'une balise pour suivre une
personne à son insu est donc illégale si la balise est placée
sur le véhicule suivi. Elle pose, également, des problèmes
pratiques car une balise n'est pas précise et ne permet pas de
localiser, au mètre près, l'itinéraire suivi. La balise peut,
ainsi, localiser une rue proche au lieu de l'itinéraire réel
si la filature est réalisée à distance depuis un bureau !
Etablir un rapport sur la base d'une balise pourrait donc
entraîner des renseignements erronés et donc un faux rapport.
D'autre part suivre une personne à distance ne permettra pas
de voir qui elle rencontre, à quelle adresse elle se rend etc...
Ce moyen doit donc être proscrit par les détectives car, d'une
part, il est illégal, et d'autre part il est imprécis.
Toutefois la pose d'une balise sur son propre véhicule,
comme une simple aide au retracé de l'itinéraire que
l'enquêteur a personnellement parcouru en suivant la voiture
d'un surveillé, ne semble pas poser de difficulté
juridique, sous réserve de l'avis d'un avocat.
Fin 2019, une proposition de loi a été déposée à l'Assemblée
Nationale dans le cadre de la protection des femmes
victimes de violences conjugales. Le texte, dont le
gouvernement a engagé la procédure accélérée le 5 décembre
2019, a modifié les articles 226-1 et suivants du code
pénal en prévoyant des sanctions lors d'utilisation de
systèmes de géolocalisation.
Cet article 10 de la proposition de loi visait à renforcer la
lutte contre le harcèlement au sein du couple. Il complète
l’article 226-1 du code pénal qui réprime les atteintes à la
vie privée en y ajoutant le fait de localiser en temps réel
une personne sans son consentement. En outre, les peines
encourues pour les atteintes à la vie privée sont aggravées
lorsqu’elles sont commises au sein du couple, afin de punir
plus sévèrement les comportements d’«espionnage » dans ce
contexte. Les outils de géolocalisation en ligne permettent
aux agresseurs de faire pression sur leurs victimes en épiant
leurs faits et gestes au quotidien. Ils sont très facilement
accessibles et dissimulables. Les rédacteurs de la proposition
de loi relevaient qu'Il s’agit d’une surveillance constante
bouleversant le quotidien de ces femmes, déjà victimes de
violences physiques ou psychologiques, à laquelle ils voulaient mettre fin.
La Commission des lois a remanié le texte initial qui a été
adopté, en commission le 15 janvier 2020, puis promulgué, par
la loi n° 2020-936 du 30 juillet 2020 (article 17). Il est
désormais incorporé à l'article 226-1 du Code pénal qui
dispose :
« Est puni d'un an d'emprisonnement et
de 45 000 euros d'amende le fait, au moyen d'un procédé
quelconque, volontairement de porter atteinte à l'intimité
de la vie privée d'autrui :
1° En captant, enregistrant ou
transmettant, sans le consentement de leur auteur, des
paroles prononcées à titre privé ou confidentiel ;
2° En fixant, enregistrant ou
transmettant, sans le consentement de celle-ci, l'image
d'une personne se trouvant dans un lieu privé.
3° En captant, enregistrant ou
transmettant, par quelque moyen que ce soit, la
localisation en temps réel ou en différé d'une personne
sans le consentement de celle-ci.
Lorsque les actes mentionnés aux 1°
et 2° du présent article ont été accomplis au vu et au su
des intéressés sans qu'ils s'y soient opposés, alors
qu'ils étaient en mesure de le faire, le consentement de
ceux-ci est présumé.
Lorsque les actes mentionnés au
présent article ont été accomplis sur la personne d'un
mineur, le consentement doit émaner des titulaires de
l'autorité parentale.
Lorsque les faits sont commis par le conjoint ou le
concubin de la victime ou le partenaire lié à la victime
par un pacte civil de solidarité, les peines sont portées
à deux ans d'emprisonnement et à 60 000 euros d'amende
».
Ce problème rappelle - d'une façon générale - la nécessité de
vérifier le bien fondé d'une mission, sa légalité, sa
légitimité, son objet réel, et de les préciser dans le
contrat signé par le client, afin de dégager la
responsabilité du professionnel s'il a été trompé par son
mandant. De même il est vivement recommandé de conserver, au
mandat, la copie d'une pièce d'identité du client.
Certains détectives, n'ayant pas reçu une formation juridique dédiée
à l'exercice de la profession, ont cru devoir utiliser des balises
sur le véhicule d'un surveillé, à son insu, pour procéder à une
filature à distance.
Ils ont donc été poursuivis au pénal (Laval, novembre 2012 -/- Vesoul Août 2018
[3
mois d'interdiction d'exercice, 6 mois de prison avec sursis, 1000
euros de dommages et intérêts et le mari client a aussi été condamné
pour avoir utilisé les données recueillies illégalement] ou,
encore Tribunal correctionnel de Béthune mai 2016)...
Si l'utilisation de balises est interdite (sauf cas particulier en
prenant le soin de vérifier la légitimité de la demande et respecter
la légalité de cette technique), en revanche leur
détection, sur le véhicule d'un client, est
bien évidemment légitime. Cela entre dans le cadre des activités de la
profession pour localiser et
neutraliser ce type d'appareil et permettre, au
client, de déposer plainte. Une telle mission porte le nom de
"contre-mesure électronique" qui nécessite des
connaissances particulières et un matériel spécifique.
Il existe un autre cas où une balise est légale, lorsque le client
craint d'être suivi par un tiers mal intentionné et qu'il souhaite
organiser une "contre-filature". Dans ce cas, l'enquêteur suivra le
client à distance pour vérifier si un autre véhicule (voiture ou moto) ne
suivrait pas le mandant.
Une balise pourra être posée, avec son accord, sur le véhicule afin
de le rejoindre rapidement en cas de perte de la surveillance
(circulation, feu rouge et autres incidents...), mais bien entendu
le mandant devra être dans son propre véhicule.
Ces missions peuvent intéresser les particuliers comme les
entreprises ou les professionnels qui craignent pour leur sécurité, y compris s'il s'agit de femmes
victimes de violences physiques, psychologiques ou de harcèlement.
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